1789, 5 avril. – Carentoir Cahier de doléances de la paroisse de Carentoir .
Cayer de doléances, plaintes et remontrances de la paroisse de Carentoir, évêché de Vennes, sous la sénéchaussée de Ploërmel. Les députés de cette paroisse sont chargés de demander : 1. La suppression de tous les impôts, charges distinctifs d’ordre, comme fouages, corvées de grands chemins, cazernement, logements de gens de guerre et franfiefs leur remplacement par un impost réparti sur tous les ordres indistinctement et proportionnellement à la fortune de chaqu’un, observant que la paroisse de Carentoir en particulier est une des plus grevées par les grands chemins, plusieurs des habitants ayants trois ou quatre lieux pour s’y rendre.
2. Que les impositions seront assisses sur les mêmes rolles pour tous les ordres ; que les tarifs des droit de controlle et insinuation seronts réformés et qu’on n’y laissera rien d’arbitraire ; que les affaires ce consernant seront jugées par des commissaires des États ; qu’il y aura au moins une commision pour examiner les affaires des particuliers, et lorsqu’elles se trouveront fondées, les États interviendront5 . 3. Que les autres impositions que les besoins de l’État pouroients exiger seronts assizes particulièrement sur les objets de luxe et délicatesse venant de l’étranger et par des vaisseaux étrangers et sur les objets manufacturés chez l’étranger ; les droits en seront perçus à l’entrée dans le royaume ; une fois que les marchandises y seronts introduites, elles ne seronts plus sujettes à aucune recherche ni impôt, étant suposées avoir acquité les droits lors de leur entrée dans le royaume.
1 Le document est paginé de 1 à 5, avec une pagination et paraphe « Rrg » dans la marge gauche de chaque page et un paraphe « Rrg » en marges haute et basse à droite de chaque page. 2 Une lettre raturée en fin de mot. 3 « Guere » corrigé en « guerre » dans le texte. 4 Plusieurs lettres raturées. 5 Fin de mot raturée. 6 « seronts » corrigé par « en seront ».
4° Tout impôt ne poura avoir lieu qu’il n’ait été consenti par la nation et pour un tems déterminé, et en Bretagne qu’il n’ait été unanimement consenti par les États, ainssi que les loix nouvelles.
5 °La répartition des impôts sera faite dans chaque paroisse par le général assemblé, auquel seront adjoints douze ou même plus de notables et habitants, qui auronts voix consultative et de remontrance ; les rolles seronts faits dans le courant du mois de décembre de l’année précédante celle où sera levé l’impost ; il ne sera plus employé un huissier éloigné pour la contrainte contre les paroisses mais un sergent haut-justicier de la paroisse ou de la plus prochaine.
6. Les coutumes et l’ordonnance civile seront réformées et les formes de la procédure abrégées ; que les écritures privées seront rendues exécutoires jusqu’à cent livres par une simple ordonnance du juge ; que l’ordonnance criminelle sera réformée et donné un conseil à l’accusé. 7. Que toutes les jurisdictions d’une paroisse seront exercées au même lieu et le même jour, surtout le jour du marché, s’il y en a ; qu’il faudra trois juges au moins pour faire un jugement ; que les juges seigneuriaux ne pouront être révoqués que pour forfaiture ; qu’il y ait seulement trois degrés de jurisdiction.
8. Que la liberté de tous les citoiens soit à l’abri de toute espèce d’atteinte ; que les milices soient supprimées ; et, au cas qu’on ne put obtenir cette suppression, qu’elles soient remplacées par des enrollemens volontaires dont sera fait fonds ; et qu’au cas encore qu’elles restassent sur l’ancien pied, qu’il soit statué que les gens de livrée et domestiques de la noblesse y soient assujetis sans exception et que l’assistance des gentilhommes au tirage des milices soit interdite pour les abus notoires qui en résultent.
9. Que les fonds des États de la province ne pouront être emploiés que du consentement unanime des représentans des trois ordres et l’état en sera imprimé à toutes les tenues ; et que, dès ce moment, les établissemens faits en faveur de l’un des ordres restent à la charge du même ordre.
10. Que tous revenus des abbaies qui viendront à vacquer seront mis en économat et emploiés au soulagement de l’État et des pauvres.
11. Que dès à présent, il sera ordonné que les rolles des seigneurs se prescriront par trois ans, faute à eux de les avoir fait pourvoir. Les seigneurs opulens affectent cette négligence pendant vingt et trente ans et alors ils exigent le paiement des vingt-neuf dernières années, ce qui opère la ruine d’un grand nombre de vassaux et l’impossibilité de démêler ce que chacun doit après les mutations arrivées nécessairement dans les familles et les propriétés.
12. Qu’il soit permis à chaque habitant de tirer sur le gibier et surtout les pigeons, qui causent chaque année des dommages si considérables sur les moissons.
13. Que les lods et ventes pour les échanges soient supprimés, les États en aiant fait l’acquisition, sauf néanmoins à l’ordre du Tiers à faire fonds pour le remboursement de ce que la noblesse justifierait avoir payé au-delà de sa cotte-part pour cette acquisition.
14. Que les vassaux soient autorisés à franchir les rentes féodalles aux taux de la coutume et sans solidité ; que les corvées exigées par les seigneurs de fiefs pour le rétablissement de leurs châteaux et moulins soient supprimées. Il est certain que les corvées pour les moulins ne sont point autorisées par la coutume.
15. Que l’eau de vie sera donnée aux paisans et artisans au même prix qu’aux privilégiés jusqu’à ce jour.
16. L’assemblée déclare adhérer aux sages réclamations des municipalités et autres communes de la province pour ce qui pourait être omis au présent.
Fait et arrêté en la chambre ordinaire des délibérations de la paroisse de Carantoir, en l’assemblée des soussignés et autres habitans, ce jour cinq avril mil sept cent quatre-vingt-neuf pour être remis aux députés qui vont être choisis pour le porter et en faire le dépôt à l’assemblée générale de la sénéchaussée de Ploërmel, sous les seings de ceux qui savent signer.
Les mots et autres interlignés approuvés. [Signé :] J. Bellamy. Briand. Joseph Hervy Jac. Cheval. Yves Coüé. Joseph Dulieu« et autres » en interligne. « et autres » soulignés. Joseph Metayer. Mathurin Maubec Jan Pinard. Mathurin Picaud9 Jan Coyac10 Jean Samouel. Joseph Guezay Charles Guillotin. Louis Coüé Mathurin Leblanc. Jan Hersard Joseph Coueraud. Leblanc Joseph Orhand. Jan Guillotin Leroy Rocher de La Manselais. Hoëo de Boisgestin, député J. Freoul, notaire adjoints